Joann Sfar – Le chat du Rabbin : Petit panier aux amandes
Editions Dargaud
Prix : 14 € – ISBN : 978-2205078350 – 60 pages

Le chat du Rabbin nous revient dans une nouvelle aventure, Petit panier aux amandes, toute aussi croustillante. Le jeune Rabbin voit débarquer un couple composé de Roger et de sa fiancée catholique Aline. Celle-ci souhaite se convertir pour faire plaisir à Roger. Joann Sfar touche ici du doigt un des problèmes clés de la religion juive, à savoir, la difficulté de s’ouvrir aux autres. Régie par des commandements aussi bien contraignants qu’absurdes, la religion juive est un long chemin pour tous ceux qui désirent se convertir, le plus souvent par amour pour leur conjoint(e)s. Le Rabbin baignant dans la religion juive depuis sa naissance est sidéré de découvrir Aline, une femme équilibrée qui désire se convertir. Mettant en avant dans un premier temps les principes rigides, il finit par refuser ensuite son concours. Zlabya, fille du vieux rabbin et femme de ce jeune rabbin, la décourage également. Le chat se met également de la partie pour la dissuader à son tour. Mais voilà que Kindelette « petit panier aux amandes » , une nouvelle venue va semer la zizanie dans cet ensemble déjà bien compliqué.

Dans La Tour de Bab el-Oued, Sfar et le chat, constatant l’échec du vivreensemble face aux religions qui engendrent la haine, étaient en plein désarroi. Avec Petit Panier aux amandes, Sfar revient à quelque chose de plus intimiste et de plus joyeux. Il est question ici d’amour, de pression familiale et de faiblesse masculine – brillamment épinglée par le chat : « Tu veux que je te parle de ta définition d’un bonhomme ? Dormir sur le canapé de sa maman. » Le chat retrouve son rôle de trublion qui tient à asséner des vérités dont personne ne veut, il se fait donc régulièrement passer par la fenêtre, ce qui le laisse un peu désabusé, mais pas trop. Pendant ce temps, le Roger, qui rêve de s’engluer sur le canapé de sa maman, fait connerie sur connerie, la cervelle truffée de contradictions inextricables. Si bien qu’il finirait par tout perdre  s’il n’avait autour de lui quelques femmes assez fortes pour y voir plus clair. Récit virtuose, dialogues extrêmement drôles ; cet album est un hommage rendu aux femmes (libres, fortes, rigolotes) et aux personnages assez sages  (le vieux rabbin, le chat) pour, chacun à sa manière, regarder les choses en face. Une merveille d’intelligence et de subtilité.

Joann Sfar est né en 1971 à Nice. Auteur de bandes dessinées, romancier, réalisateur, chroniqueur : son curriculum vitae tient de l’inventaire à la Prévert. Concernant la bande dessinée, Sfar compte plus d’une centaine d’albums à son actif, de Donjon  à Pascin et de Klezmer à Chagall en Russie, sans oublier Petit Vampire. Son chef d’œuvre reste Le Chat du rabbin, avec plus d’un million d’exemplaires vendus.

Une série culte qu’il a adaptée au cinéma avec Antoine Delesvaux et qui a reçu, en 2011, le césar du meilleur film d’animation. Une distinction qu’il avait déjà obtenue pour son Gainsbourg (vie héroïque). S’il se définit lui-même comme un dessinateur compulsif, cet adepte d’un trait vivant jeté sur le papier est aussi un authentique écrivain.
Il a récemment publié, avec succès, deux romans : Comment tu parles de ton père (Albin Michel, 2016) et Vous connaissez peut-être (Albin Michel, 2017).